Gestion du changement: pourquoi vos projets de transformation numérique échouent

Par Valérie Auclair

La gestion de changement consiste à anticiper les résistances et à les gérer avant, pendant et après un projet. Les projets de migration vers de nouvelles solutions technologiques (GED, GID, CRM, ERP, etc.) soulèvent des résistances naturelles, mais parfois inattendues. Un plan de communication et d’autres outils vous permettront de favoriser le succès de votre projet de transformation numérique.

Projet prometteur, résultats catastrophiques

Vous avez de la volonté. Un budget. Une équipe compétente. Vous voulez mettre fin aux recherches de documents infructueuses, aux erreurs de versions, aux frustrations et aux recommencements improductifs. Vous investissez donc dans un logiciel de pointe et une formation.

Votre équipe informatique migre les documents et données d’un coup (efficace!). Vos employés sont attentifs lors de la formation, quoiqu’un peu dépassés. Pas de souci : le nouveau logiciel est intuitif et performant. Vous avez confiance que l’équipe se l’appropriera rapidement.

Toutefois, quelques mois après la migration, un constat s’impose : c’est la catastrophe! Les recherches n’offrent pas les résultats miraculeux promis. Les erreurs de version s’accumulent toujours. La productivité des employés ne s’est pas améliorée. Pire : lorsqu’on leur parle du logiciel, les employés lèvent les yeux au ciel et n’ont aucun commentaire positif à faire.

Que s’est-il passé?

Vous avez minimisé l’ampleur du changement et négligé de le gérer.

Analysons ça.

Impacts d’un projet : l’excitation du positif et la réalité du négatif

Lorsque vous avez amorcé votre implantation de logiciel, vous étiez positif et enthousiaste (avec raison!). Les impacts positifs étaient évidents :

  • Meilleures qualité et fiabilité de l’information,
  • Meilleure performance,
  • Réduction des coûts,
  • Conformité réglementaire et légale accrue.

Toutefois, vous n’aviez pas conscience que, pour vos employés, il y aurait d’abord des impacts négatifs sur leur quotidien :

  • Charge mentale et charge de travail accrues temporairement;
  • Courbe d’apprentissage et d’ajustements, qui varie d’une personne à l’autre;
  • Habitudes de classement et de recherche bouleversées;
  • Perte de repères dans des opérations sans valeur ajoutée (perte de temps, confusion, frustration).

D’abord, la nouvelle de la migration leur est parvenue une fois le logiciel prêt à être déployé. Ils ont aussitôt été envoyés en formation, sans avoir le temps de se faire à l’idée. Personne n’arrivait à visualiser ce qui changerait concrètement dans ses opérations spécifiques, ce qui a causé un malaise profond.

Ensuite, bien que vous ayez offert une formation, celle-ci ne portait que sur l’utilisation du logiciel. Elle ne prenait pas en charge les changements dans vos processus, ni les inquiétudes de certaines personnes face à ces changements. Les employés ne savaient pas à qui poser leurs questions, et plusieurs n’étaient pas à l’aise de se manifester.

Finalement, pour certains utilisateurs moins technophiles, la nouvelle interface n’a rien d’intuitive. Ils s’ennuient de leur bon vieux serveur de fichiers, dans lequel ils « savaient où chercher » (malgré les recherches difficiles!).

Ainsi, votre gestion de changement était partielle, avec plusieurs angles morts.

À considérer : l’amour de la zone de confort

Par nature, l’être humain aime le connu et le rassurant. Vous connaissez le proverbe : Mieux vaut un mal connu qu’un bien qui reste à connaître.

Ainsi, la majorité des personnes (comme vos employés) vont préférer leur inconfort familier à un changement dont les bénéfices sont incertains.

C’est souvent le cas lors de projets de transformation numérique. L’équipe projet ayant analysé les pour et les contre, elle est donc convaincue et enthousiaste au moment de déployer. Mais elle oublie que les utilisateurs n’ont pas ce recul et cette vision long terme.

Pour les utilisateurs, un environnement de travail familier permet de se concentrer sur les tâches comme telles. L’énergie mentale est consacrée à « ce qui doit être fait » plutôt qu’à « comment faire ce qui doit être fait ».

Évidemment, un système familier mais déficient gruge une part d’énergie pour le « comment », et suscite ses frustrations propres. Néanmoins, c’est généralement moins demandant qu’apprendre un tout nouveau système, surtout dans un contexte de surcharge de travail et de pénurie de main d’œuvre.

Il est donc essentiel de considérer cet élément dans la planification et le déploiement de votre projet.

Facteur de réussite : Une communication bien ciblée

Les messages corporatifs sont souvent enthousiastes, mais trop abstraits pour rejoindre les équipes dans leur réalité. Par exemple, « Notre organisation sera plus efficace » ne dit pas par quels moyens y arriver, ou selon quels critères en juger.

Pour gagner l’adhésion des gens, il vaut mieux leur montrer comment le changement annoncé impactera leur quotidien de façon concrète et positive. Ainsi, la phrase « Vous trouverez vos documents plus facilement grâce à l’indexation du contenu des documents, qui permet des résultats de recherche plus exhaustifs » promet des éléments tangibles qui évoquent la réalité des interlocuteurs.

Évidemment, on ne va pas à ce niveau de détail dans une annonce corporative. C’est pourquoi vous devriez prévoir plusieurs communications dans votre plan de déploiement.

Notre recommandation de plan de communication

Pour un projet typique où une organisation passe des serveurs de fichiers à un logiciel de GED, voici les grandes communications que nous recommandons. D’autres peuvent s’ajouter selon votre contexte, l’ampleur du projet, le niveau de maturité numérique de l’organisation, etc.

Moment Transmise par Contenu
Avant le déploiement, lorsque le projet est officiel et planifié Haute direction

Annonce de :

  • la nature du projet
  • es bénéfices à haut niveau
  • ·du calendrier (ça peut être vague comme « à l’automne »)
  • la suite pour les utilisateurs (ex. : « Au cours des prochaines semaines, votre gestionnaire vous avisera de la période de déploiement prévue pour votre équipe. »)
Avant le projet, lorsque le moment du déploiement de l’équipe est connu Chargé de projet, au gestionnaire seulement

Avis de :

  • l’échéancier spécifique prévu pour l’équipe, incluant les formations
  • les actions requises par les utilisateurs, s’il y a lieu
  • les enjeux techniques prévus ou potentiels (ex. : des dossiers seront indisponibles pendant une période X)
Avant le projet, lorsque le moment du déploiement de l’équipe est connu Gestionnaire de l’équipe

Rappel du projet

  • Présentation plus concrète des bénéfices
  • Annonce des dates prévues pour les différentes étapes incluant les formations
  • Annonce des attentes envers les utilisateurs (ex. : « D’ici cette date, vous devez avoir éliminé les dossiers vides et les doublons. »)
Au début du déploiement Chargé de projet ou gestionnaire, selon l’organisation

Rappel des :

  • étapes avec leurs dates
  • impacts techniques de la migration
Pendant le déploiement (s’il s’échelonne sur plusieurs jours) Chargé de projet ou gestionnaire, selon le besoin

Rappel

  • de la prochaine étape
  • des attentes envers les utilisateurs

Idéalement, lors de chaque communication, on indique aux récipiendaires à qui transmettre les questions, inquiétudes, etc.

Autres facteurs de réussite : consultation, formation, rétroaction

La communication n’est pas le seul élément à considérer pour une gestion de changement réussie. La consultation des utilisateurs, leur formation et la cueillette de leur rétroaction sont aussi importantes.

Consultation : le plus possible

Plus les gens sont impliqués dans la prise de décision, mieux ils adhèrent à celle-ci. Dans un monde idéal, pendant la phase d’analyse des besoins, on tiendrait des ateliers de brainstorming avec l’ensemble des employés. Dans le monde réel, c’est souvent infaisable, et la décision est prise à haut niveau.

Essayez quand même d’impliquer les utilisateurs lorsque possible. Cela réduira leurs résistances, et vous serez gagnant à long terme.

Formation : essentielle

La formation est souvent prévue dans les plans de déploiement, mais de façon unidimensionnelle. On montre aux utilisateurs les technicalités par une vidéo enregistrée ou une séance en direct, on leur transmet quelques aide-mémoires, et voilà!

Or, les humains n’apprennent pas tous de la même façon, ni au même rythme. Tous n’ont pas le même niveau d’aisance numérique non plus. Tenez-en compte et prévoyez différents formats, des suivis, du coaching personnalisé. Les gens doivent aussi savoir qui peut les aider par la suite (côté technique, côté utilisation, etc.).

Rétroaction : en continu

On pense souvent à la rétroaction comme une étape de fin de projet. Certes, celle-ci est importante, mais, en gestion de changement, on veut une rétroaction en continu.

La rétroaction est l’occasion aux utilisateurs de s’exprimer et de questionner. Plusieurs résistances naissent de l’incompréhension et de l’incertitude : vous gagnerez donc à les éviter le plus possible en amont.

Ainsi, prévoyez un canal de rétroaction à la suite des différentes communications et étapes du projet. En fait, prévoyez différents types de canaux, selon le cas. Ce peut être une personne-ressource, une adresse de courriel dédiée, un formulaire sur l’intranet, une boîte à messages dans le bureau, etc.

Ces canaux servent aussi aux personnes récalcitrantes, voire mécontentes. Elles pourront exprimer leurs doléances et être écoutées, au lieu de ruminer leur frustration.

La gestion de changement : clé de voûte d’un projet réussi

La gestion de changement contribue à la réussite de tout projet. Elle peut être simple pour les petits projets et les petites équipes, ou de grande ampleur pour les grandes organisations et les projets complexes.

En gestion de l’information, on néglige souvent à quel point les dossiers sont familiers. Les clics de navigation deviennent même automatiques pour certaines personnes aux tâches répétitives. Si changer de plateforme est simple pour une équipe informatique, ça reste un bouleversement important pour plusieurs individus.

Ainsi, anticipez les impacts du changement sur le quotidien de vos équipes, communiquez à celles-ci ses bénéfices concrets, prévoyez plusieurs communications et différents modes de formation. Vous partirez sur des bases solides!

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